Laos. Phra That Luang: the symbol of Lao permanence

Phra That Luang, littéralement grand stupa, est le symbole parfait du Laos dans son histoire millénaire, dans sa culture religieuse et cultuelle, dans sa permanence en tant que nation et en tant que peuple, dans sa diversité ethnique tout comme dans la représentation du bouddhisme, décrété religion d’Etat par le Roi Fa Ngum au XIVème siècle, une fois fondé le royaume de Lanexang (un million d’éléphants) et du Parasol blanc.

Phra That Luang, or Grand Stupa, is the perfect symbol of Laos in all its aspects. Whenever we see a picture of Phra That Luang, read or talk about it, we know for sure that it’s the essence of Lao history, Lao religious and worshiping culture, its permanence as a nation and a people in all its ethnic diversity, as well as  the representation of Buddhism, declared state religion by King Fa Ngum in the 14th century once his Lanexang (one million elephants) and white parasol’s kingdom was founded.

Selon la légende, puisqu’il n’existe aucun élément archéologique (une seule fouille très limitée avait été pratiquée en 1934), le premier That aurait été construit sous la forme d’un obélisque au IIIème siècle avant l’ère chrétienne pour conserver des reliques du Bouddha historique Gotama, apportées par un haut dignitaire (Phraya Chanthabury Pasithisak) et des bonzes et chargés par l’empereur indien Asoka ou Ashokkamahalath de répandre le bouddhisme à travers l’Asie du sud-est (1). Le That originel, à base de pierre, aurait donc vu le jour du temps de la civilisation khmère ancienne, quand ses habitants s’appelaient encore des Cham. Le développement du royaume de Champa le long des côtes du Vietnam, à la même époque, donne du crédit à cette thèse. (2)

According to the legend, since there is no archaeological evidence (one limited excavation had been conducted in 1934), the very first That would have been built as a four faces obelisk in the 3th BCE in order to enshrine  Lord Buddha’s relics brought to Laos by a high ranking dignitary (Phraya Chanthabury Pasithisak) and five Arahata monks. Their mission was to spread Buddhism all over South East Asia (1). The original That had so been built during the ancient Khmer civilization when its inhabitants were known as the Cham. The presence of a rich Champa kingdom, at the same moment, along Vietnam’s cost gives some credit to this thesis. (2)

Une statue de JayavarmanVII, le dernier grand roi de l’empire khmer (fin XIIème-début XIIIème siècle), trouvée sur site, accréditerait cependant la thèse d’une construction moins ancienne du Phra That Luang. Mais une chose est sûre : nous devons au Roi Sayasetthathirath (1534-1572) sa forme actuelle à trois niveaux (comme le Triple Joyau ou les Trois Joyaux), entourée des 30 stupas plus petits, des Samatiamsa Palami  (ou Parami samsib-that), les 30 perfections bouddhistes.

Selon la légende, donc, le Roi Asoka, devenu très pieux après un début de règne sanglant, autorisa le placement des reliques de Bouddha à l’intérieur de 84.000 stupas, conformément aux 84.000 points de la Tripitaka (triangle bouddhiste) avant de les disperser à travers l’Asie du sud et jusqu’en Asie du sud-est. D’où  l’envoi des missions telles que celle qui avait amené les reliques de Bouddha au Laos. Et selon la tradition du bouddhisme lao, le placement de ces précieuses reliques à l’intérieur du Phra That Luang primaire avait été accompagné de 84.000 objets cultuels (statuettes, cierges en argent et en or etc.) (3).

A statue of Jayavarman VII, the last great king of the Khmer empire (end of 12th century, beginning of the 13th), found there suggests that the construction of Phra That Luang is not that old. But there is one certainty: it was King Sayasetthathirath (1534-1572) who gave its present shape to Phra That Luang with its three levels (just as the Triple Gem in Buddhism) and with 30 small stupas all around (the Samatiamsa Palami stupas), the 30 Buddhist perfections or fulfillment of goodness.

According to the legend, then, King Asoka, who had become very peaceful and pious after a bloody reign, let the holy relics being enshrined in 84.000 smaller stupa, like the 84.000 points of  Tripitaka (Buddhist triangle), before sending them to all the countries in South Asia and South-East Asia, like the delegation who had brought the sacred relics to Laos.  And according to Lao Buddhist tradition, the holy relics had been enshrined in Phra That Luang with 84.000 cult objects such as statuettes, silver and gold candles and so on…(3)

La renommée  de Phra That Luang ne date donc pas d’aujourd’hui, même s’il a pris une place plus centrale encore dans l’identité et la culture lao en devenant la pièce maîtresse des armoiries du pays en 1991. Son emplacement géographique (en haut d’une colline) le prédestinait déjà à devenir incontournable. Et comme les tout premiers vat ou wat (pagode ou monastère) connus au Laos avaient été édifiés sur le même site lors de la visite, justement, des émissaires bouddhistes venus d’Inde (4), Phra That Luang devenait et reste le point de rassemblement (Boun That Luang) et de passage obligé.

Phra That Luang’s fame was an old story even though it has become more and more accurate nowadays as it has taken the central place in Lao identity, Lao culture by becoming the main piece of the national seal in 1991. By its location, on a small hill overlooking Vientiane, Phra That Luang is a monument to be seen and to visit. Besides, the very first wat (pagoda) had also been built at the same place when Buddhist monks came to visit Laos from India (4). Since then, Phra That Luang has become a gathering point (That Luang Festival, political meetings and so on…)

Selon des chercheurs et archéologues de l’Ecole française d’Extrême-Orient (EFEO) chargés des différentes restaurations du Phra That Luang, entre 1929 et 1936,  il existe au moins un stupa primitif sous l’actuel. Léon Fombertaux écrit ainsi à Georges Coedès, directeur de l’EFEO : « Une construction carrée de 17,88 m de côté, s’élève sur 5,25 m pour s’incurver sur 5,35 m plus haut suivant un puits de 1,30 m, formant ainsi à 10,60 m de haut un arasement de 15,25 m de côté. Cinq grandes feuilles de lotus couronnent chaque côté » (5).

According to researchers and archaeologists from Ecole française d’Extrême-Orient, in charge of the restoration of Phra That Luang, between 1929 and 1936, there is at least one older stupa under the current one. Léon Fombertaux wrote to Georges Coedès, then EFEO’s director: “A building of 17,88 square meter side raises from 5,25 m to 5,35 m on curve above along a 1,30 m wells to form at 10,60 m hight a 15,25 m leveling side. Five big lotus leaves cover each side of the stupa” (5).

L’étude des stèles datant du XVIème siècle par Michel Lorrillard reconnaît aussi au roi Sayasetthathirat la paternité de la construction de Phra That Luang dans sa structure actuelle, par-dessus une structure plus ancienne. Mais dans quel état se trouvait cette dernière en 1566 ? Et y avait-il ou non un monument originel postérieur à celui recouvert par Phra That actuel ? Faute de données archéologiques, Lorrillard a dû, comme d’autres chercheurs, se remettre à la description faite par les Phongsävadän : « Setthathirat arriva à Vientiane et y bâtit un grand « chedi » recouvrant et parfaisant le « that » d’autrefois construit par le roi Si Thammasokarät (Asoka).  (6)

A cause d’invasions étrangères accompagnées de pillages et de destruction,  dont la dernière en 1827-28 par les troupes siamoises qui rasaient pratiquement tout Vientiane de la carte, y compris sa population dont six des 10.000 familles avaient été déportées, Pra That actuel est le fruit des différentes restaurations effectuées par la France.

In a study of 16th century’s steles, Michel Lorrillard also attributed to King Sayasetthathirat the construction of Phra That Luang as its appears now, encompassing an old structure. But he can’t tell whether there is or not an original stupa under the one found by EFEO’s architects. So, like other researchers, he had been obliged to quote the Phongsävadän: “Setthathirat arrived in Vientiane and built a great “chedi” while perfecting the “that” erected by King Si Thammasokarät (Asoka). (6)

Because of foreign invasions and destruction, the last one in 1827-28 by Siamese troops that had all but wiped out Vientiane, including its population, six out its 10.000 families had been deported to Siam, we have today’s Pra That thanks to restorations made by France.

C’est grâce aux dessins de Louis Delaporte et aux plans du monument faits par Francis Garnier en avril 1867 que le Phra That Luang actuel a été restauré à l’identique du That construit par le Roi Sayasetthathirat en 1566, six ans après l’installation de la capitale du royaume à Vientiane. La restauration, qui durera huit ans entre 1929 et 1936, a été placée sous la responsabilité de l’architecte Louis Fombertaux, en charge de la suite des restaurations du Vat Sisaket, entre 1929 et 1930, après les premiers travaux effectués par Charles Batteur (1920-1923) (7). Mais nous devons la reconstruction du Phra That  Luang à Henri Parmentier, chef du service archéologie à l’EFEO, qui par deux fois écrit à l’école, en 1912 et 1928, pour souligner les avantages que la France pouvait retirer du « travail peu important (…), qui rendrait à cet intéressant moment son effet réel (…) et qui serait en outre de bonne politique, car ce monument est le plus révéré par les indigènes de toute la région » (8).

Phra That Luang had been rebuilt exactly as the Phra That built by King Sayasetthathirat in 1566, six years after he moved his capital from Luang Phrabang to Vientiane, thanks to drawings by Louis Delaporte and Francis Garnier’s plans, both made at the same time, in April 1867. The works of reconstruction lasted eight years, from 1929 to 1936, and was directed by Louis Fombertaux. This French architect was responsible for the second part of the restoration of Vat Sisaket (1929-30), the very first Lao Buddhist monument to be restored by French authorities in Vientiane. His fellowman Charles Batteur was at Vat Sisaket from 1920 to 1923 (7). Nevertheless, Henri Parmentier, then EFEO archeology’s bureau chief, was the real man behind the rebirth of Phra That. He had sent two reports, in 1912 and 1928, to EFEO urging them to restore the moment because France could get enormous political advantage from “this not so important work (…), that would bring back its real effect to this interesting monument (…) and would be of a good policy because this monument is the most revered by indigenous of the whole region”. (8)   

La beauté de Phra That Luang, décrit par l’historien de l’art Bernard Groslier comme “l’une des plus grandes réalisations de l’architecture bouddhiste » (9), avait subjugué le premier visiteur occident officiel du royaume du Lanxang dès 1641. Le marchand néerlandais Gerrit van Wuysthoff décrit ainsi sa rencontre avec le grand stüpa : «Je passe par une grande place carrée entourée d’un mur de pierres percé de meurtrières. Il y a au milieu une grande pyramide large et haute, couverte de feuilles d’or pesant un millier de livres dans sa partie supérieure» (10). De  nos jours, aucun visiteur ne peut rester insensible à la ligne si parfaite et si particulière du Phra That Luang, à la fois simple, mystérieux, mais d’une extrême finesse !

Et même le New York Times a été ébloui par « l’éclat du temple d’or, le symbole de la nation lao ». « Peu importe le nombre de photos de Phra That Luang que vous aviez vu avant votre arrivée, dès la première vue, même à plus d’un kilomètre, vous auriez le souffle coupé. Et vous seriez pardonné de penser que c’est le stupa, et non le soleil, qui éclaire le ciel », « écrit le quotidien américain en 2007.  (11)

The beauty of Phra That Luang, which art historian Bernard Groslier described as “one of the great achievements of Buddhist architecture” (9), had taken under its spell the first official western visitor to the Lanxang kingdom in 1641. Dutch merchant Gerrit van Wuysthoff wrote about his encounter with the stupa: “I walked through a big square place surrounded by a stone wall pierced with loopholes. There is in the middle an enormous pyramid with the top covered with gold leaf weighing about a thousand pounds” (10). Nowadays, no one can resist being enticed by the simple beauty of this masterpiece of pure Lao art.

For the New York Times, Phra That Luang, “the shining golden temple, is Laos’s national symbol”. “It doesn’t matter how many photographs you’ve seen of the Pha That Luang before you come. The first glimpse, even from a mile away, will take your breath away. You could be forgiven for thinking that the stupa, not the sun, is lighting up the sky”, wrote the Times in 2007. (11)

Les raisons premières

En l’absence de données scientifiques, historiens, chercheurs et experts sont obligés de s’en remettre à la légende populaire pour trouver les raisons de la construction du That primaire, à savoir un reliquaire bâti du temps d’Asoka -sur ordre de l’empereur indien selon certaines sources- pour abriter une ou des reliques de Bouddha, dans le cadre de la propagation du Bouddhisme en Asie du Sud-est. Si l’Unesco parle de « stupa indien » comme origine du That actuel, qui recouvre « un édifice antérieur contenant une relique de Bouddha » (12), d’autres sources précisent qu’il s’agit d’un morceau « d’os de l’iliaque » ou du sternum, les stèles et la littérature lao indiquent simplement que ce sont des reliques corporelles ou des reliques secrètes. La tradition du bouddhisme lao interdit, en effet, de nommer précisément les parties auxquelles sont rattachées ces reliques parce qu’elle considère que seuls Bouddha et les grands maîtres laissent des reliques sacrées à leurs disciples après la crémation de leur corps. D’ailleurs les reliques de Bouddha et des grands maîtres se présentent sous forme de petites billes translucides (des sariras), ou de cristaux de sel ou du sable (des patânn), les ossements tout blancs se révélant beaucoup plus rares. D’où le terme générique de sariradhätu (ສາຣິຄະທາດ) (13).

The main reasons

Historians, researchers and experts had to count on popular legends when it comes to the reasons of the construction of the very first That: a reliquary built during Asoka’s time -ordered by the Indian emperor according to some sources- to enshrine a holy relic of Lord Buddha within the framework of his mission to spread Buddhism in South-East Asia. According to Unesco, an Indian stupa was the model of the current That which recovers “an early building containing a Buddha’s relics” (12), while other sources indicate that it was a “pelvic bone” or a “breast bone”. Lao literature and steles only mentioned bodily relics or secret relics. According to Lao Buddhism traditions, it’s forbidden to say from which part of the body resulted the relics because they believe that only Buddha or great masters can leave relics to their followers once their body have been cremated. Moreover, these relics are usually in the form of small translucent balls (sariras), or of crystals of salt or sand (patânn), while white bones are quite rare. That’s why Lao people call them by the generic name of sariradhätu (ສາຣິຄະທາດ) (13).

 

Nom originel

A l’arrivée du roi Sayasetthathirath à Vientiane, en 1560, Phra That Luang était connu sous le nom de « thät » ou « Phra Mahä Thät » et n’avait pris son nom complet qu’à la fin des travaux de construction du monument dans sa forme actuelle, entouré des 30 petits stupas, symbolisant les 30 Päramï du bouddhisme, et avec un « vat » (pagode) à chacun des quatre points cardinaux (14). Le site officiel de l’ambassade de la RDP Lao aux Etats-Unis parle « d’un petit stupa, symbole de la fondation de Vientiane, la ville du bois de Santal, l’une des principautés lao avant la création du royaume du Lane Xang » (15) par le roi Fa Ngum en 1354. Si l’histoire lao accorde la paternité quasi exclusive de la construction de Phra That Luang à Sayasetthathirat, les stèles de fondation étudiées par Michel Lorrillard (op. cit.) révèlent que son père, le roi Phothisarät qui l’avait placé sur le trône du Län Nä (Chieng Mai) en 1546, serait lui aussi un fervent bâtisseur de stupa et de pagodes, celui du That Luang ancien en particulier. Même si, de l’avis de l’orientaliste, « un noyau encore plus ancien », de facture môn, pouvait exister. Le texte lao des stèles parle donc de « Phra Maha That Chao Chieng Mai » ou le « grand stüpa du prince de Chieng Mai », en référence au règne de Setthathirat au Län Nä. Le texte pali évoque « Lokaçünlamani » (ພຣະທາດເຈດີໂລກະຈຸລາມະນີen Lao), c’est-à-dire le monde du joyau inséré dans une crête ou un stupa, ce qui nous ramène aux raisons historiques de la construction de Phra That Luang : un reliquaire de Bouddha. Mais la présence des cendres du  Phraya Muang Ket Klao, auquel il avait succédé, dans un stupa du Wat Lokamoli, à Chieng Mai, pourrait laisser penser que le roi Sayasetthathirat entendait rendre hommage à son grand-père maternel avec le nom original de Phra That Luang (M. Lorrillard, op.cit.).

Original name

When King Sayasetthathirat moved his capital from Luang Phrabang to Vientiane in 1560, people simple called Phra That Luang “that” or “Phra Maha That”, and it only got its complete name once the construction of the present monument was finished, surrounded by 30 small stupa of the same sizes, to symbolize the 30Buddhist Parami, and with a “wat” at each side of the four cardinal points (14). Lao PDR embassy to USA’s website said that “the little stupa previously existing is the symbol of the founding of Vientiane, the City of Sandal woods, one of the Lao principalities existing before the unified Lane Xang kingdom”, (15) founded by King Fa Ngum in 1354. While Lao history gave the exclusive paternity of Phra That Luang’s construction to Sayasetthathirat, Michel Lorrillard (op.cit.) suggested that King Phothisarat, who had made him king of Lan Na (Chieng Mai) in 1546, was also a great builder of stupa and wat. According to the results of his study of the That Luang’s foundation steles, his father Phothisarat could have built the ancient that, although the researcher also acknowledged that “there might be a more ancient core”, of Mon’s style. According to Lao texts, the name of the stupa is « Phra Maha That Chao Chieng Mai » or “the big stupa of Chieng Mai’s prince”, with reference to Sayasetthathirat’s time on Chieng Mai’s throne. In the Pali texts, it’s « Lokaçülamani » (ພຣະທາດ ເຈດີ ໂລກະຈຸລາມະນີ in Lao), which is the place where sacred relics are enshrined in a stupa. So we are back to the very first reasons of the Phra That Luang’s construction: a Buddha’s reliquary! However, Michel Lorrillard also suggested that this later name could simply be a tribute to Phraya Muang Ket Klao, his maternal grandfather, whose ashes are kept in a stupa at wat Lokamoli, in Chieng Mai. The young prince succeeded his grandfather in Lane Na kingdom in 1546 (op.cit.). 

Les 30 parami

Les 30 petits stupas ou parami samsib-that, qui entourent le Pha That Luang, lui donnent non seulement son originalité et sa beauté, ils remplissent également et surtout une fonction religieuse très importante. Chaque stupa représente une perfection, en partant de l’offrande aux moines (tak-bat) jusqu’à la sérénité ou l’indifférence, en sachant que celui/celle qui aspire à l’illumination doit accomplir ces 30 perfections. L’abondance des dons (esclaves, terrains, rizières, animaux, bijoux, et même une princesse, fille de Sayasetthathirat) faits par le roi et sa cour répond aux mêmes aspirations et l’existence de ces trésors avait été confirmée lors de la destruction par la foudre d’un (ou deux) des petits « that » en 1896. Louis Finot avait relevé, en 1903, cinq objets : deux petites stèles en or sur lesquelles étaient gravées les perfections, deux feuilles d’or où figuraient des extraits du Tipiuaka et une petite gaine de forme conique en argent (16).  Quelques années plus tard, Suzanne Karpès avait signalé d’autres objets trouvés au That Luang : deux that en or massif, deux feuilles d’or, deux boîtes en or incrustées de pierreries, deux fleurs en or, une bague en or, deux Bouddha en pâte de bois, plaqué d’argent, un that d’argent et une boîte en argent (17). La tradition lao veut effectivement que tout bouddhiste fasse don d’un objet précieux à un nouveau that, sim ou sîmâ dont le cœur contient ainsi les offrandes les plus diverses de la population de tout un village ou de toute une ville. Parfois, les gens effectuent un long trajet à pied pour participer à cette action de grâce, très rare. Car, ce geste va non seulement unir symboliquement, et  pour toujours, cette communauté de destin, qui reconnaît en même temps que le centre de son univers vital se trouve dans les fondations de ce that ou de ce sim. Où qu’il aille de par le vaste monde, un lien invisible reliera chaque membre de la communauté à ses racines sociales et culturelles.

The 30 parami

The 30 small stupas, ou parami samsib-that, around the Phra That Luang, are not only the symbol of its beauty and its originality, they also have a very important religious function. Each stupa represents a Buddhist’s perfection, starting from almsgiving (tak-bat) and up to equanimity or indifference. And whoever aspires to enlightenment has to perform all these 30 perfections. Donations made by Sayasetthathirat and his court, with hundred of slaves, animals, jewels, land and even a princess, the daughter of the king, had the same aspirations and objectives. The reality of these treasures had been underlined by findings made in 1896 when one (or two) small stupa had been disemboweled by lightning. In 1903, Louis Finot had noticed five objects: two golden steles where were written the perfections, two golden leaves with extracts from the Tipiuaka and a small silver sheath in a conical form (16). A few years later, Suzanne Karpès had mentioned other findings at Phra That Luang: two gold that, two golden leaves, two golden boxes encrusted with precious stones, two gold flowers, a gold ring, two silver plated Buddha in wood pulp, a silver that and a silver box (17). In fact, Lao traditions encouraged every Buddhist follower to donate precious objects to a new that or sim (or sîmâ), so that its foundations or its heart is full of various offerings from people of the whole village or the whole city. Sometimes, donors would make a long trip by walk to take part in these rare thanksgivings. A very important achievement in a Buddhist’s life because, he/she will be forever united to his/her community, and especially, he/she will know for sure where are his/her social and cultural roots wherever they are in the wider world.

En guise de conclusion

Si les chercheurs, historiens de l’art et orientalistes tentent de percer les secrets de la construction du Phra That Luang originel afin de dater avec exactitude sa fondation et connaître le nom  de son premier bâtisseur, il restera à jamais le symbole d’une certaine idée de la vie, simple et harmonieuse, de la beauté raffinée, et de la permanence d’un art dont les racines remonteraient jusqu’aux territoires du l’ancien Lane Na, royaume jumeau du Lane Xang. Pour le people lao, et plus largement t’aï-lao, Phra That Luang représente à la fois son passé, sa culture, son identité et sa fierté d’appartenir à l’une des plus vieilles civilisations de l’histoire. Symboliquement, comme les Trois Joyaux (Bouddha, son enseignement, ses disciples) et ses trois niveaux, Pra That Luang est à jamais associé à trois noms : Asoka, Bouddha et Sayasetthathirat. Et nous laissons volontiers à une journaliste du New York Times le soin d’apporter la touche finale à notre voyage initiatique au sein du monument le plus célèbre et le plus vénéré du Laos: « Peu importe le nombre de photos de Phra That Luang que vous aviez vu avant votre arrivée, dès la première vue, même à plus d’un kilomètre, vous auriez le souffle coupé ! »

Phra That Luang,  which will keep researchers, art historians and orientalists trying to find the secrets of its original foundations, is and will be forever the symbol of a way of life, simple and smooth, of a fine beauty and the permanence of an art which could have roots in the former kingdom of Läne Nä. For Lao people, and T’ai-Lao in general, Phra That Luang represents not only its past and its culture, but it’s also its identity and pride to belong to one of the oldest civilization in the world. Symbolically, such as the Three Germs (Buddha, his teaching, his followers) and its three levels, three names are forever associated to Phra That Luang: Asoka, Buddha and Sayasetthathirat. And we’re glad to let a New York Times newswoman to have the last word on our passionate travel inside this most sacred and most famous monument in Laos: “It doesn’t matter how many photographs you’ve seen of the Phra That Luang before you come. The first glimpse, even from a mile away, will take your breath away!”

ENCADRE

. Dimensions

Hauteur de la flèche centrale: 45 m

Premier niveau : 69 m par 69 m (avec un Horwaï, lieu de prières, à chacun des 4 côtés)

Deuxième niveau : 48 m par 48 m. Entouré par 120 pétales de lotus et où se trouvent les 30 petits stupa, des parami-samsib-that ou perfections

Troisième niveau : 30 m x 30 m

. Dates

304 à 232 avant l’ère chrétienne : règne de l’empereur Asoka

216 avant EC : construction du That primaire

1535 ( ?) : construction d’un second That par le roi Photisarath ( ?)

1566 : construction du That dans sa forme actuelle par le roi Sayasetthathirat

1641 : visite du marchand néerlandais Gerrit van Wuysthoff

1828 : pillage de Vientiane et destruction de la flèche de Phra That par les troupes siamoises

1900 : première restauration par la France

1931-35 : restauration par l’Ecole française d’Extrême-Orient selon les dessins de Louis Delaporte et les plans de Francis Garnier réalisés en 1867

2010 : pour le 450e anniversaire de la fondation de la capitale à Vientiane, l’esplanade a été élargie (de 6,67 m2 à 12,75 m2)

. Boun That Luang

Du 26 au 28 novembre cette année. Avec en particulier la foire internationale (talad-nat) en l’honneur de l’année du tourisme au Laos et dans cinq provinces du centre (Vientiane, Borikhamxay, Khammuane, Savannakhet et la capitale Vientiane). Tous les ans, la fête comporte des cérémonies religieuses (offrandes aux bonzes, vien-thien ou fête des lumières) et laïques (le tikhi qui serait à l’origine du polo ; les spectacles culturels de danses et de chants etc.) et se termine le 15e jour de la lune croissante du mois de novembre.

Notes

(1) Une seule source (oocities.org/marcamata/Vientiane.html) parle des cinq moines comme étant des bonzes lao, partis faire des études en Inde, et qui rentrent au pays avec les reliques de Bouddha. En l’absence de données scientifiques sur les relations entre l’Inde d’Asoka et les différents royaumes se trouvant alors sur le territoire du pays lao -existait-il déjà une entité lao ?-, nous nous contenterons aussi de la version de la légende, rapportée oralement depuis des générations.

(2) Andrew Hardy – Le Champa, une civilisation peu connue in efeo.fr/expo%20Cham/Intro/Intro.htm

(3) Michel Lorrilard évoque d’ailleurs Asoka comme le “propagateur des 84.000 reliques” de Bouddha. Les donations en personnes (fille du roi, esclaves), en bijoux, en terre, en rizière et objets les plus variés au Phra That Luang par Sayasetthathirat et sa suite tend aussi à souligner l’existence de quelque chose de vraiment sacré pour les Bouddhistes.  Les inscriptions du That Luang de Vientiene: données nouvelles sur l’histoire d’un stüpa lao (http://lao.efeo.fr/IMG/pdf/efeo_lorillard_inscriptions-that-luang.pdf)

(4) Wat That Luang, in orientalarchitecture.com

(5) Michel Lorrillard op.cit.

(6) Michel Lorrillard op.cit.

(7) Michel Lorrillard op.cit : Vat Sisaket est le premier monument de l’art bouddhiste lao restauré par les autorités françaises de Vientiane. Il y eut, en fait, une première restauration effectuée par Pierre Morin en 1900, sans respect du That d’origine et dont la vue choquait tous les visiteurs

(8) BEFEO 12, p.192-193 cité par Michel Lorrillard

(9) Allen W. Hopkins & John Hoskin – The Land of Million Elephants : Laos, Allied Printers, Bangkok, 1994

(10) Le journal de voyage de Gerrit van Wuysthoff et de ses assistants au Laos, 1993

(11) The New York Times in travael.nytimes.com (January 14, 2007)

(12) whc.unesco.org/fr/listesindicatives/391/

(13) Michel Lorrillard s’étonnait d’ailleurs de cette manque de précision en soulignant qu’il « existe précisément un lien entre la nature exacte de l’organe hérité du Buddha et le degré de reconnaissance du caractère sacré du monument qui le recouvre » (Les inscriptions du That Luang, op.cit.). Il s’avère encore plus étonnant que l’orientaliste évoque les cheveux parmi les reliques dans la mesure où Bouddha et les grands maîtres ont toujours le crâne rasé et que les cheveux, s’il y en avait, n’auraient jamais résister au feu… Et que dans l’acception lao de reliques, il ne peut s’agir que de restes, une fois le corps incinéré.

(14) Aujourd’hui, il ne reste plus que deux pagodes : le vat That Luang nua (au Nord) et vat That Luang Taï (au sud).

(15) www.laoembassy.com

(16) Louis Finot – Ex-voto du That Luang de Vieng-Chan (Laos), BEFEO 3

(17) M. Lorrillard op.cit.

A propos laosmonamour

ເກີດຢຸ່ບ້ານມ່ວງສູມ ເມືອງທ່າແຂກ ແຂວງຄໍາມ່ວນ ໄດ້ປະລີນຍາ ຕຣີແລະໂທ ຈາກມະຫາວິທຍາໄລ Robert-Schumann (Strasbourg) ແລະ ປະລີນຍາເອກ ຈາກມະຫາວິທຍາໄລ Paris-Sorbonne, Paris IV Travaille à l'AFP Paris après une licence et une maîtrise à l'école de journalisme de Strasbourg (CUEJ - Robert-Schumann) et un doctorat au CELSA (Paris-Sorbonne)
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6 commentaires pour Laos. Phra That Luang: the symbol of Lao permanence

  1. lamluuk dit :

    Très intéressant…Je relirai sporadiquement ce texte informatif. Ce monument lumineux représente une des premières illustrations portée à ma connaissance sur le Laos. Comme ceux et celles et qui en rapportaient des photos, j’étais saisie par la Beauté, le raffinement, tout cet or, les stupas, les boutons de fleur de lotus qui figurent souvent à l’avant-plan des photos des uns et des autres. Ce fut le premier lieu qui composa mon rêve de fouler le sol de ce pays, un jour. Je devine déjà, comme vous le soulignez, que la réalité dépassera la représentation déjà magnifique qui m’habite. L’or qui enlumine ce lieu sacré d’une grande magnificence, m’est, me semble-t-il, une représentation extérieure de ce qui, en chacun, appelle à la transcendance. Khob tchay lay lay.

    • laosmonamour dit :

      La rencontre avec Phra That Luang ne laisse jamais personne insensible. C’est très spécial. A la fois simple, raffiné et immuable, le Phra That vous prend dans ses bras. « To take under the spell » comme disent si bien nos amis anglo-saxons! Merci de vos commentaires.

  2. David THANADABOUTH dit :

    Salut Souli, c’est un grand plaisir de te retrouver ici. Notamment ton article sur That Luang m’a apporté beaucoup de connaissance nouvelle.

    Merci
    David

    • laosmonamour dit :

      Je suis ravi aussi de te retrouver. Merci à Phra That Luang alors… J’ai passé un temps fou en recherches parce qu’on n’en finit pas de découvrir de nouveaux éléments. A bientôt…

  3. Wendy33 dit :

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